Les origines du Sablon

 

Prononcer le mot de Sablon devant les habitants de Metz, c’est réveiller dans leur esprit le souvenir d’un terrain situé au dehors de la Porte Serpenoise et renommé pour ses cultures maraîchères. Mais qu’en est-il exactement de ce quartier aujourd’hui intimement lié à Metz ?

Situé sur la rive gauche de la seille, le Sablon à l’époque romaine est mentionné sous le vocable Ad Arenas (en latin Arena signifie sable). Une charte de 880 parle d’une vigne située près de Metz in loco qui dicitur Savelonis. En 1365, dans la chronique du Doyen de Saint-Thiébault, on trouve le Savelon. L’origine de ce nom est à chercher dans la qualité des terrains qui composent son site. Il s’agit d’une plaine formée d’un vaste dépôt d’alluvions siliceuses reposant sur des argiles, d’où l’analogie avec le sable qui a donné Sablon.

Le Sablon a joué un rôle important aux différentes époques de l’histoire de Metz. Au Moyen-Age, le Sablon existait en tant que ban et non comme village. Il était composé de maisons éparses et de fermes dont les noms sont parvenus jusqu’à nous : fermes de Halsidrac, de Rivage, de Sainte Agathe et de Tivoli. On a coutume d’y joindre la ferme fortifiée de la Horgne au Sablon, mais cette dernière était une annexe de la commune de Montigny, tout en dépendant de la paroisse du Sablon depuis 1852. C’est à une date plus récente, au cours des XVIIème et XVIIIème siècles, que le village proprement dit s’est constitué à partir de ces fermes, aux lieu et place d’anciens faubourgs de la ville de Metz : Bourg Saint-Clément, Bourg Saint-André . Chacun de ces bourgs rappelle le souvenir des premières abbayes fondées sur le territoire du Sablon au début de l’introduction du christianisme dans notre région, en particulier le monastère bénédictin de Saint-Clément et les chapelles de Saint-Pierre-aux-Champs et de Saint-André qui avaient tous été détruits en 1552 , sur ordre du Duc de Guise enfermé dans Metz, alors que Charles Quint, installé au château fortifié de la Horgne assiégeait la ville. Le Duc de Guise transporta les religieux et les reliques de Saint-Clément à l’intérieur de la cité. Plus tard, les Bénédictins se retirèrent rue du Pontiffroy où les bâtiments existent toujours à l’heure actuelle.

Erigé en commune du canton d’Augny en 1790, le Sablon passa en 1802 dans le canton actuel, soit Metz III. Dix maires se succèderont à la tête de la nouvelle commune, de 1790 à 1914. A cette époque, le village comptait 60 maisons et 202 habitants.

Cette population s’accrut rapidement pour atteindre, au milieu du XIXème siècle, 93 maisons et 868 habitants dont 94 garçons et 20 filles fréquentaient l’école, 1072 habitants en 1870, 4080 en 1900 et 10720 en 1910.  A partir de 1802, le Sablon fut une annexe de la paroisse Saint Martin mais vers 1845 la municipalité forma le projet de construire une église. Cet édifice fut terminé en 1851 et béni par Monseigneur Dupont des Loges. Vers 1900-1910, l’augmentation de la population nécessita la construction d’une nouvelle église dont la première pierre fut posée le 9 mars 1914, mais les malheurs de la guerre arrêtèrent les travaux. On les reprit après l’armistice et l’édifice fut inauguré le 18 mars 1928.

En même temps, les activités économiques s’intensifiaient et se diversifiaient. Les cultures maraîchères restaient l’activité principale avec 169 hectares de territoire cultivés en jardins, potagers, et vergers. Légumes et primeurs servaient à l’approvisionnement de Metz et étaient exportés dans les villes voisines.

Avec l’augmentation de la population, de petites industries vinrent s’installer sur le territoire du Sablon. On y trouvait à la fin du XIXème siècle, la brasserie Amos avec 85 ouvriers et une production annuelle de 30 000 hectolitres, un tailleur de pierres, une menuiserie, une blanchisserie de toiles et une fabrique d’allumettes. L’adduction d’eau fut réalisée en 1897. Ses restaurants et ses guinguettes étaient très fréquentés par les Messins voisins.

Au début du XXème siècle, le caractère purement rural du Sablon s’est perdu. Le développement de l’industrie et des affaires, et l’essor considérable de sa population s’expliquent par le fait qu’en réalité, le Sablon est devenu un faubourg de la ville de Metz, Ce ne sont plus les maraîchers ni les cultivateurs qui forment alors la majorité de la population mais bien des commerçants, des fonctionnaires, et des ouvriers de toute sorte dont le centre d’activité se trouve à Metz. Et ce caractère ira en s’accentuant à partir de la mise en service de la nouvelle gare en 1908 et de l’extension des nouveaux quartiers de Metz en liaison avec le Sablon pendant la période de l’annexion. C’est pourquoi, afin de mettre leurs intérêts en communs, le Sablon fut incorporé à la ville de Metz le 1er avril 1914, et participa dès lors au développement historique et économique de cette dernière.

C’est sur le territoire du Sablon, hors des murs de la cité messine, que se trouvaient la plupart des grands monuments de Metz sous les Romains : les thermes, l’amphithéâtre, mais aussi les nécropoles ainsi que plusieurs des antiques édifices de la foi chrétienne dans cette ville, églises et abbayes, outre l’abbaye Saint-Clément déjà citée, les abbayes Saint-Arnould et Notre-Dame-des-Champs. Malheureusement il ne reste plus de traces de ce riche passé car le Sablon a servi, ainsi qu’on l’a vu, de glacis de protection à Metz au cours des multiples sièges que la ville eut à soutenir. Pourtant, son sous-sol, en particulier au lieu-dit La Horgne au Sablon, a fourni de nombreux témoignages archéologiques de l’époque romaine et médiévale que l’on peut admirer aux Musées de Metz. C’est également sur le territoire du Sablon que, selon une des nombreuses traditions qui la rapportent, se situe la légende du dragon de Saint Clément.

Arrivé à Metz pour christianiser les populations. Saint-Clément apprend qu’un monstre a élu refuge dans l’amphithéâtre romain. Il s’y rend et après avoir lié le serpent avec son étole, il l’entraine jusqu’à la Seille où le monstre se noie. Saint-Clément se serait d’ailleurs installé sur le territoire du Sablon pour convertir les Médiomatriques, y serait mort et aurait été enterré dans une grotte.

Ce court exposé aura permis de constater que le Sablon est célèbre à plus d’un titre et que sa réputation comme lieu historique vaut bien celle que lui ont faite ses jardins et ses légumes.

 

                                                                             Monique SARY